Pyrénées-Orientales : jeune infirmière en première ligne sans CDI, Mélanie cherche désespérément un appartement à louer
Diplômée de l’école d’infirmières de Perpignan depuis 2021, Mélanie Gailliez, 27 ans, a choisi de travailler en intérim, après un premier CDI de quelques mois, pour acquérir une expérience diversifiée avant de se fixer. Problème : sans contrat à durée indéterminée, la jeune femme galère depuis des mois pour louer un T2 avec un petit extérieur, terrasse ou jardinet. Les agences refusent systématiquement ses demandes.
Hébergée à droite à gauche depuis plusieurs mois, alternant entre famille et amis, si Mélanie Gailliez n’a aucun mal à trouver des postes d’infirmière en intérim, elle échoue à dégoter un toit. « Depuis avril dernier, j’ai téléphoné à presque toutes les agences du littoral et de la plaine, je me suis présentée à des rendez-vous, j’ai visité des appartements et chaque fois la même réponse revient en boucle », témoigne la jeune professionnelle. Ses demandes sont systématiquement refusées.
Au tout début de sa carrière, entamée dans un centre de Soins de Suite et de Réadaption (SSR) de Font-Romeu, « j’ai décroché un CDI et j’ai tout de suite déniché un logement à proximité », confie la blouse blanche qui enchaîne en Cerdagne par une mission en Ehpad et continue d’avoir son petit chez soi. Or, la Salanque, son littoral de naissance lui manque et à 27 ans elle décide de redescendre exercer à Perpignan et dans les environs. Aussitôt inscrite dans une agence d’intérim spécialisée dans les professions de santé, Mélanie reçoit des propositions qu’elle accepte sans compter. Actuellement en poste à l’hôpital de Narbonne, elle rejoindra à la mi-août le service SSR post-réa du centre hospitalier de Perpignan. « J’aime tourner sur différents soins, chaque mission forge l’expérience, c’est très formateur », estime la vingtenaire qui envisage ensuite de postuler auprès de cliniques privées des Pyrénées-Orientales ou dans des établissements pour personnes âgées.
En attendant, elle travaille sans cesse Mélanie mais en traînant son statut de salariée intérimaire comme un boulet. « Je gagne dans les 2 300 euros mensuels au lieu des 1 800 euros en CDI, j’ai l’argent pour me payer un appartement avec caution et mois d’avance, mais personne pour accepter mon offre », déplore-t-elle. En quête d’un T2 doté d’une petite terrasse ou d’un jardinet et d’une place de stationnement si possible, elle se confronte à un insoluble manque de CDI. « Depuis avril dernier, je me trouve face à des murs. Des agents immobiliers qui ne veulent pas entendre parler de CDD ni de garant sauf pour les étudiants, des particuliers qui préfèrent louer à des retraités qu’à une jeune active… Si je n’avais pas de famille ni d’amis pour me dépanner, je serai à la rue », se désole Mélanie. En rêvant d’un petit nid douillet bien à elle où elle pourrait enfin tranquillement se reposer après ses gardes de douze heures.
Je travaille dur et je n’ai pas le droit de me loger, c’est franchement injuste
Consciente qu’il serait certainement plus facile de chercher à Perpignan que sur les extérieurs, elle préfère néanmoins rester sur un périmètre plus rural, idéalement tourné vers la mer. « Je fais énormément de sport, du vélo, de la course, j’ai besoin de nature », confesse l’infirmière qui continue de tenter sa chance entre Leucate village et Saint-Cyprien, en passant par les communes voisines de l’arrière-pays. Résultat, « rien de rien. J’étais prête à monter en prix et en gamme, sur un T3 par exemple, mais c’est toujours la même rengaine », regrette Mélanie. Qui a également essayé de passer par une assurance visale, un dispositif destiné au moins de trente ans dans lequel l’Etat se porte garant. « Je l’ai obtenue mais peu d’agences l’acceptent et je n’ai pas eu d’offres pour autant », stresse la professionnelle qui n’est pas la seule dans cette galère. « Une collègue de l’hôpital de Perpignan était en CDI, mais elle n’a pas réussi à avoir un appartement au Moulin-à-Vent tant qu’elle était en période d’essai. »
Fatiguée de se faire ainsi refouler, Mélanie Gailliez ne veut toutefois pas perdre espoir. « C’est pesant, compliqué mais on aide tellement les autres dans notre métier, que j’espère que quelqu’un comprenne ma situation. Je travaille dur et je n’ai pas le droit de me loger, c’est franchement injuste », pique l’infirmière en poursuivant ses visites.
Nicolas Bardetis : « Elle a fait le choix de la précarité et du littoral, c’est son problème pas celui de la profession »
Nicolas Bardetis, président de l’Ordre des infirmiers de l’Aude et des Pyrénées-Orientales, ne considère pas le cas de Mélanie Gailliez comme une problématique de la corporation. « Dans le département, sauf sur les secteurs prisés et touristiques, nos infirmières et infirmiers n’ont pas de difficultés à se loger. Si cette jeune femme élargit son champ, elle trouvera de la disponibilité. Son histoire n’est pas représentative de notre territoire ni de notre profession », répond sèchement le représentant.
Nicolas Bardetis, qui s’affiche par ailleurs surpris, met en cause les choix de la jeune femme. « Elle a décidé de faire de l’intérim, c’est un choix de précarité, et de cibler le confort de vivre sur le littoral ou la côte. Elle aurait fait celui du CDI, il faut savoir que les employeurs déploient alors tous les dispositifs pour proposer des solutions d’hébergement à leurs salariés. Quant à nous, l’Ordre, nous restons extrêmement vigilants sur l’accompagnement de nos jeunes diplômés », conclut-il.